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En cage



Ce n’est pas le genre de choses auxquelles je pense quand je prends des photos, mais le résultat est là : cet album s’ouvre et se referme avec une grille. Le plan de communication de ces derniers mois, entièrement centré sur les casses, avait pour but d’aboutir à ça, et il a enfin payé.

Nous voilà donc mis en rang, scrutés, fouillés, triés sur le volet avant même de pouvoir entrer pour faire les hamsters dans leur roue. Les groupes trop nombreux ? refoulés. Ceux qui refusent de laisser leur foulard ou leurs casques, idem. Plus inquiétant, des journalistes indépendants ayant un peu trop tendance à filmer les affrontements et les violences policières auront bénéficié d’un tour en camion dans Paris s’achevant au poste sans aucun motif. Aucun papier ne leur sera délivré bien entendu. Ni vu ni connu, propre et « sans bavure ».


La fin justifie les moyens nous dit Manuel Valls. Le pays est mis en danger par l’ultra gauche. Ceux-là même qui « dévastent » les hôpitaux d’enfants malades, soutenus par ceux qui diffusent sur internet des idées un peu trop anticapitalistes. Toute cette mauvaise graine est liée, on le sait bien. Valls prendra d’ailleurs la peine de l’associer à l’islam radical et à l’extrême droite le jour même, devant le Sénat. (http://urlz.fr/3Mct) . La presse ne l’avait de toutes façon pas attendu pour prononcer cette grande condamnation. Ces « sales twittos » ne sont que des « avatars de chiens de Pavlov dont les clabaudages rappellent à bien des égards la populace robesperriste » selon Le Point (édito du 9 juin 2016). Quant à France Inter, Léa Salamé nous fait bien comprendre qu’entre arracher une chemise et s’attaquer à des enfants malades, il n’y a qu’un pas : http://urlz.fr/3Mcv

En même temps que les casses, le gouvernement s’est donc méthodiquement employé à effacer tout signe de colère, d’agitation, d’indignation. Un défilé, ça se fait pendant 45 minutes maximum, et après on rentre, hop hop hop plus vite que ça. Les libertés, ça vient après, d’abord la « sécurité ». Et puis comme de toutes façons pas même une virgule ne sera déplacée dans cette loi hein, personne ne perd à rentrer plus vite chez lui… Voilà un bien mauvais pli que ce gouvernement impose à notre République (un de plus), que d’autres ne manqueront pas de reprendre une fois au pouvoir.


Et pourtant, et pourtant. Les manifestants ne désespèrent pas. Ils continuent de croire en leur pouvoir. Et le recul démocratique à vitesse grand V de ces derniers temps ne rend cette opiniâtreté que plus belle. Ils ont continué à marcher, à faire des pancartes, à parler entre eux, à rire et à chanter. 


Alors que certains syndicats sortaient déjà de la cage bien tranquillement à la fin de leur petit tour, Nuit Debout lançait un nouveau mot d’ordre en se retournant : « le bon sens, c’est le contre sens ! », se jouant alors pendant quelques minutes des règles imposées. Ce n’est presque rien, c’est vrai. Juste de quoi se rappeler que l’insoumission ne se limite pas à une violence aveugle dans laquel les défenseurs de l’ordre établi voudraient l’enfermer. Juste de quoi se mettre en tête qu’il restera toujours une faille dans laquelle s’engouffrer. Car si nous sommes condamnés à devoir jouer cette petite comédie de contestation désormais, alors oui, il s'agira de se faufiler dans les failles.

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